Chapitre 6 : Un fils horrible
- Je t'en parlerai après en avoir discuté avec elle, maman.
Emmanuel décida de laisser les choses telles quelles pour l'instant. Puisqu'il ne pouvait ni accepter ni refuser, il n'avait d'autre choix que de procéder étape par étape.
- Alors, parfait, répondit Alessandra.
- Et si tu déménageais pour aller vivre avec elle aujourd'hui ? Les femmes aiment les hommes romantiques. C'est votre nuit de noces, tu n'as donc pas intérêt à la laisser toute seule ! Prends bien soin d'elle. C'est compris ?
La nuit de noces ? Emmanuel ricana intérieurement. Si ça ne lui avait même pas traversé l'esprit, alors Mackenzie n'y aurait certainement pas pensé non plus. Cette femme n'avait jamais pensé à consommer leur mariage.
Il n'y a aucune chance que ça se produise un jour !
Il salua tout de même sa mère et sa sœur d'un signe de tête.
- Dans ce cas, je m'en vais. Prenez soin de vous. Appelez-moi quand vous aurez besoin de moi.
Ces mots suffirent à faire pleurer Alessandra et Roselynn. Le père d'Emmanuel était mort jeune, et les deux femmes avaient vu Emmanuel grandir. Aujourd'hui, voir le seul homme de la famille quitter la maison leur rendait le cœur lourd.
- Ne pleure pas, maman. Comment vas-tu avoir des petits-enfants si Mannu ne vit pas avec ta belle-fille ? demanda Roselynn, même si elle n'arrivait pas à s'arrêter de pleurer.
Pendant un long moment, les femmes aidèrent Emmanuel à emballer ses affaires de valeur. Alessandra lui glissa une carte bancaire dans les mains au moment où il s'apprêtait à partir.
- Qu'est-ce que tu fais, maman ?
Il s'empressa de la lui rendre. Il savait que sa mère n'avait qu'une seule carte et il ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle était en train de lui donner sa pension retraite. Il ne pouvait tout simplement pas l'accepter.
- Prends-la, insista Alessandra. Ta femme a accepté de t'épouser sans que tu lui fasses de cadeau de fiançailles. Elle a même acheté un appartement pour que vous puissiez y vivre, alors ne la déçois pas. Donne-lui tout ce qu'elle mérite ! Il y a environ soixante mille sur cette carte. Va acheter à ta femme une bague et des bijoux. Est-ce que tu m'entends ?
En entendant ces paroles, Emmanuel sentit son nez brûler.
Je suis un fils horrible. C'est son fonds de retraite ! Elle a déjà cinquante-sept ans. Qu'est-ce qu'elle va faire si je prends tout ce qui lui reste ?
- Prends-le, Mannu. C'est ce que maman souhaite.
Roselynn lui lança un regard.
La jeune femme connaissait bien sa mère, elle savait donc qu'Alessandra avait peur que sa belle-fille parte si Emmanuel ne faisait pas ce qu'elle voulait.
Emmanuel devait donc prendre l'argent pour la rassurer et la présenter à Mackenzie, que cette dernière le veuille ou non.
- Si tu veux vraiment remercier maman, reviens ici avec ta femme dès que possible pour qu'on puisse la voir, dit Roselynn.
En réalité, elle avait des doutes. Son frère s'était engagé dans un mariage éclair, après tout.
- Je comprends.
Sur ce, Emmanuel se retourna et partit rapidement. Il n'était pas insensible, simplement il ne voulait pas que sa famille voie à quel point ses yeux étaient devenus rouges. Il se sentait tellement coupable maintenant. Sa mère avait toujours voulu qu'il ait un mariage heureux, mais au lieu de cela, il s'était trouvé une femme au hasard pour participer à une simple mise en scène.
- La vérité ne sera jamais révélée, du moins pas avant qu'elle n'ait quitté ce monde, murmura Emmanuel, se sentant terrifié.
Si elle découvrait que tout ceci n'était qu'une mise en scène, Alessandra ne le supporterait pas.
Après avoir quitté la maison, Emmanuel se rendit à la Résidence Yociam comme Mackenzie le lui avait demandé par texto. C'était un quartier huppé de Yeringham où le mètre carré coûtait plus de dix mille euros. Il y avait de nombreux bâtiments, mais Mackenzie lui avait seulement dit que le numéro de l'appartement était le 1701, sans mentionner le numéro du bloc.
Heureusement que j'avais eu le réflexe de demander son contact WhatsApp en sortant de l'hôtel de ville. Je ferais mieux de lui demander maintenant.
Il laissa donc un message vocal à Mackenzie.
Malgré le fait qu'il était six heures du soir, Mackenzie était toujours en pleine réunion de travail. En tant que PDG du Groupe Terence, elle ne consultait jamais ses messages pendant les réunions. Après avoir attendu un long moment sans recevoir de réponse, Emmanuel se dit que la femme ne pouvait pas répondre à son message. Il lui envoya donc un message texte. Il n'y avait toujours pas de réponse. La nuit était tombée, et l'estomac vide d'Emmanuel rongeait sa patience. Finalement, il décida de faire un appel vidéo. Il savait à quel point Mackenzie était froide et n'avait pas vraiment envie de lui parler.
Mackenzie ne l'avait pas ajouté à ses contacts lorsqu'ils avaient échangé leurs numéros plus tôt. Au moment où elle entendit soudain son téléphone sonner, elle jeta un coup d'œil à l'écran. C'était une chose extrêmement rare. Ceux qui la connaissaient savaient qu'elle répondait à tous les messages qui avaient de l'importance pour elle, mais lorsqu'il s'agissait de personnes qu'elle ne connaissait pas, elle ne répondait pas, même un appel vidéo ne la ferait pas changer d'avis.
Voyant que quelqu'un portant le nom d'utilisateur, Mystérieux et magnifique avec une photo de profil inconnue l'appelait, Mackenzie fronça les sourcils et bloqua le numéro.
C'est bizarre ! Quand ai-je donné mon contact à cette personne ?
En voyant la façon dont elle avait renvoyé l'appel, Emmanuel sut que Mackenzie avait son téléphone sur elle et essaya de relancer l’appel.
Pourtant, il reçut une notification : Cet utilisateur n'accepte que les appels et les messages de ses amis.
C'est quoi ce merdier ?
Hébété, Emmanuel fixa l'écran pendant un long moment.
Cette femme ne se fout pas de moi, n'est-ce pas ?
Fort heureusement, il eut l'intelligence de se rappeler que Terence était son grand-père.
Bien que le numéro de Terence n'était pas enregistré, ce dernier l'avait appelé plus tôt dans la matinée, alors il lui avait suffi de jeter un coup d'œil à l'historique de ses appels pour le retrouver.
- Hé, papy, qu'est-ce qui se passe avec votre petite-fille ? Elle m'a demandé de venir vivre avec elle à la résidence Yociam, pour ensuite bloquer mon numéro ! Vous vous foutez de ma gueule ? Est-ce une sorte d'arnaque au mariage ? Ce n’est pas comme si j'avais quelque chose que vous pouviez me prendre !
Terence fut instantanément à court de mots.
Décidément, elle déteste les hommes...
- Du calme, jeune homme. Je l'appelle tout de suite !
Il essaya tant bien que mal de consoler Emmanuel, inquiet de perdre son nouveau petit-fils par alliance.
La famille Quillen était si puissante que même Terence ne savait pas exactement combien d'entreprises avaient été créées par Mackenzie. Il devait le lui demander.
Entre-temps, Mackenzie était sur le point de reprendre la réunion lorsque son téléphone sonna à nouveau. Elle voulut raccrocher, mais en réalisant que c'était son grand-père, elle n'eut d'autre choix que de répondre.
- Qu'est-ce qu'il y a, grand-père ? Tu sais bien que je suis en réunion.
Comme si j'en avais quelque chose à faire de ta réunion ! Ça n'est pas aussi important que de me donner un arrière-petit-enfant !
- Mackenzie, n'as-tu pas demandé à Emmanuel de vivre avec toi ? Il est déjà à la résidence Yociam, par contre il ne sait pas dans quel bloc se trouve la résidence.
Oh, en effet.
Mackenzie se rappela enfin qu'elle s'était mariée aujourd'hui.
Zut ! Quel était son nom déjà ? Franchement, les hommes sont si pénibles !
- Dis-lui que nous logeons dans le bloc B, grand-père.
Mackenzie raccrocha aussitôt pour que son grand-père ne puisse pas lui dire de contacter Emmanuel elle-même. Elle ne saurait pas comment le faire, de toute façon. Lorsqu'elle raccrocha, Mackenzie remarqua tous les regards subtils qui se posaient sur elle. Bien sûr, étant donné qu'elle était la PDG de Terence Group, personne n'osait dire un mot, à l'exception d'une jeune femme qui se pencha vers elle en souriant.
- Mackenzie, était-ce ton mari ?
Mackenzie lui lança un regard noir, ce qui la fit se taire immédiatement. Cette femme n'était autre que la sœur de Mackenzie, Beatrix. Secrètement, elle se réjouissait d'être la cadette de la fratrie. Autrement, c'est elle qui aurait dû épouser le beau spécimen qui venait d’appeler son grand-père. Toutefois, elle était également curieuse de savoir qui pourrait avoir le courage de prendre pour épouse sa sœur qui détestait les hommes.
Héhé. Je me demande combien de temps il pourra supporter son caractère. Trois jours ? Peut-être qu'il en aura marre et déménagera dès le deuxième jour !